Au sommaire de ce reportage :
- Penn-ar-Bed
- Desserte estivale des îles : des affrêtements à l’André Colin
- André Colin, desserte des îles finistériennes
- André Colin en images…
- André Colin, une vedette ayant fait son temps
Penn-ar-Bed
La Penn-ar-Bed est une compagnie maritime créée en 1992 par
le Conseil Général du Finistère pour prendre la suite du SMD (Service Maritime
Départemental). Elle fait partie du groupe Kéolis et a décroché son premier
contrat de Délégation de Service Public en décembre 2008 pour 7 ans.
Penn-ar-Bed exploite 6 navires, dont 3 paquebots côtiers, 2
vedettes à passagers et 1 caboteur.
^^ Cliquez sur l’image pour afficher le site de Penn-ar-Bed ^^
Année de construction : 1996
André Colin, une vedette rapide peu rentable et ayant mal vieillie...
L'André Colin en juin 2018 aux côtés d'autres navires condamnés et attendant leur démolition à Brest.
^^ Cliquez sur l’image pour afficher le site de Penn-ar-Bed ^^
Desserte estivale des îles : des affrêtements à l’André Colin
Dans les années 1990, les îles de Molène et de Ouessant
étaient desservies par deux paquebots côtiers, l’Enez Eussa III et le Fromveur,
mis en service respectivement en 1977 et 1992. En été, un navire rapide
complétait le dispositif. Au début des années 1990, c’était l’Ar Vro, un
catamaran de 27 mètres de long pouvant transporter 200 passagers à la vitesse
de 18 nœuds qui assurait le complément du Fromveur et de l’Enez Eussa III. Revendu
à Finist’mer en 1994, Penn-ar-Bed a décidé de le remplacer par le catamaran affrété
Anahitra, un ancien crew boat de la SURF datant de 1983. Long de 31 mètres, il pouvait
transporter 230 passagers à la vitesse de 25 nœuds.
L’Ar Vro désarmé à Brest (CC BY-SA 3.0).
L’Anahitra arrivant à Ouessant (CC BY-SA 3.0).
Dès 1994, le Conseil Général du Finistère et la compagnie
Penn-ar-Bed ont décidés de lancer des études pour la construction d’une vedette
neuve afin de mettre un terme aux affrêtements durant l’été pour compléter la
flotte. C’est le chantier Lorient Naval & Industries, proposant une
vedette à l’allure futuriste, qui a été retenu pour la construction de la
nouvelle unité. Annoncé comme un prototype, le Conseil Général du Finistère a
réussi à négocier un prix défiant toute concurrence.
En attendant l’arrivée de la nouvelle vedette, c’était un
monocoque de 24 mètres affrété auprès d’Emeraudes Lines qui complétait la
flotte de Penn-ar-Bed : le Mont Orgueil. Ce navire pouvait charger jusqu’à 150
passagers et filer à 20 nœuds.
Lancé le 24 mai 1996, l’André Colin, c’est le nom donné à la
nouvelle vedette, a été convoyé à Brest pour qu’il soit équipé de ses
éléments de sécurité et de navigation. Des essais ont eu lieu au cours du mois
de juin 1996 et l’André Colin a finalement effectué son voyage inaugural le
dimanche 30 juin 1996.
L'André Colin à quai au port de Sainte Evette (Audierne) en octobre 2009.
Appareillage de la cale de Sainte Evette.
L’André Colin en route pour les îles en mai 2008.
L’André Colin rentrant dans le Goulet de Brest en avril
2010.
Fin-mai 2010, l’André Colin est entré en carénage à Brest
durant 3 semaines afin de remettre aux normes le navire. Une porte d’accès au
salon a été créée sur bâbord en lieu et place de l’ancienne trappe d’évacuation,
la drome de sauvetage a été remplacée, les défenses sur la coque ont été reprises,
les moteurs révisés et des modifications ont été apportées au système de
ventilation du bord. Il a repris du service le 17 juin 2010 avec une rotation
Brest-Camaret-Sein.
Notons que l'André Colin a servi de lieu de tournage pour le film Les Seigneurs sorti en septembre 2012.
Notons que l'André Colin a servi de lieu de tournage pour le film Les Seigneurs sorti en septembre 2012.
L'André Colin en l'air.
André Colin, desserte des îles finistériennes
L’André Colin était donc affecté à la desserte des îles
situées au large du Finistère, à savoir Ouessant, Molène et Sein au départ de Brest,
du Conquet, de Camaret et d’Audierne. En période d’avant et après
saison(avril-mai-juin-septembre), les lundi, mardi, jeudi et samedi, il faisait
une rotation entre Brest, Camaret, Le Conquet, Molène et Ouessant avec un
départ le matin du continent et retour des îles le soir. Après son arrivée
matinale à Ouessant, il repartait pour Le Conquet, via Molène, pour ne repartir
du Conquet qu’en fin d’après-midi. Il faisait alors escale à Molène puis à
Ouessant avant de redescendre directement au Conquet, à Camaret et enfin retour
à Brest en soirée. Les mercredi et vendredi, il partait très tôt de Brest à
vide pour effectuer un départ de Ouessant puis Molène en début de matinée puis
revenait à Brest, via Le Conquet.
En haute-saison (mi-juillet à la mi-août) et du lundi au
samedi, l’André Colin appareillait le matin de Brest, via Camaret et Le Conquet
pour un direct Ouessant. Le retour de Ouessant était programmé en fin
d’après-midi pour un direct Le Conquet-Camaret-Brest sans escale à Molène.
Le dimanche, l’André Colin effectuait une rotation vers
l’île de Sein au départ de Brest (9h00) et de Camaret (9h45). Le retour de Sein
était programmé à 17h00, pour un retour à Brest à 18h45.
Au mois de février, l’André Colin remplaçait l’Enez Sun III
qui partait en arrêt technique annuel à Concarneau. Il assurait généralement un
départ le matin d’Audierne et un retour en fin d’après-midi de Sein.
Pour finir, les temps de traversée approximatifs pour
l’André Colin sur les différentes lignes :
- Brest-Camaret : 30 minutes
- Camaret-Le Conquet : 45 minutes
- Camaret-Ouessant : 1h30
- Camaret-Molène : 1h15
- Camaret-Sein : 1h05
- Le Conquet-Molène : 30 minutes
- Le Conquet-Ouessant : 40 minutes
- Ouessant-Molène : 20 minutes
- Audierne-Sein : Moins d’1 heure
La carte des liaisons proposées par l’André Colin. Les liaisons
surlignées en rouge
correspondent à celles desservies par l’André Colin en saison et celle en noir à la liaison Audierne-Sein, desservie par le navire en remplacement de l'Enez Sun III.
Avant de continuer
ce reportage, revenons sur les caractéristiques de l'André Colin :
Caractéristiques administratives
Vedette à
passagers : ANDRÉ COLIN
Quartier maritime: BREST
Armateur
propriétaire : DÉPARTEMENT DU FINISTERE (1996 > 2016) ; RÉGION
BRETAGNE (2017-2018)
Armateur gérant
: PENN-AR-BED (1996 > 2016)
Chantier naval
: LORIENT NAVAL & INDUSTRIES, LORIENTAnnée de construction : 1996
Date de mise à
l’eau : 24 mai 1996
Année de
désarmement : 2016
Année de
déconstruction : 2018
Caractéristiques d’exploitation
Capacité :
195 passagers
Équipage :
5 marins
Vitesse de
croisière : 23 nœuds
Caractéristiques géométriques
Longueur hors tout
: 34,90 m
Longueur entre
perpendiculaires : 31,00 m
Largeur :
7,00 m
Creux :
3,50 m
Tirant d'eau
: 1,65 m
Port en lourd
: 31 tonnes
Caractéristiques techniques
Coque : Acier
Propulsion
: 2 moteurs Diesel rapides quatre temps MWM type TBD 620, 12 cylindres en V,
entraînant chacun à 660 tr/mm une hélice à pales fixes par l’intermédiaire d’un
réducteur.
Puissance
: 2x1525 kW (2x2073 ch) à 1800 tr/mm
Production
d’électricité : 2 groupes Diesel-alternateurs de 68 kW chacun
Jauge brute : 293 UMS
Jauge nette
: 159 UMS
Propulseur
d’étrave : Non
Stabilisateur
antiroulis : Non
La plaque du chantier naval Lorient Naval & Industries.
André Colin en images…
L’André Colin à quai à la gare maritime de Brest.
En route pour les îles ! Photo prise depuis la presqu’île de
Crozon.
Passage au large de Camaret.
L’André Colin en escale au Conquet.
La poupe.
L’André Colin à quai à l’appontement du port de Lampaul (Ouessant).
L’André Colin le long du môle de Men Brial à l’Île de Sein.
L’André Colin sur coffre à l’Île de Sein.
Retour des îles.
Entrée dans le goulet de Brest.
Arrivée de l’André Colin dans le port de Brest.
L'André Colin dans les bassins de commerce de Brest pour soutage.
Soutage dans le bassin n°5 du port de Brest.
Soutage dans le bassin n°5 du port de Brest.
Vu de trois quarts arrière.
Visite du navire
Je vous propose, pour commencer, de découvrir les espaces
accessibles à tous les passagers.
Le salon
Situé sur le pont 2 et accessible depuis le quai par une
porte de chaque côté, le salon pouvait accueillir 195 personnes. On retrouvait
des rangs de 3 sièges de long des sabords sur l’avant du salon, avec au centre
des groupes de 4 sièges. Sur la partie centrale du salon, le long des baies
vitrées on retrouvait des rangs de 3 sièges puis sur l’arrière des rangs de 4
sièges au centre du navire.
Plan de l’aménagement du salon.
Le salon vu depuis l'extérieur.
La partie avant du salon.
La porte d’entrée tribord du salon.
La partie arrière tribord du salon.
Le petit salon
Le petit salon pouvait accueillir quelques passagers assis
autour d’une table. Nous y retrouvions également le bar qui proposait des
boissons aux passagers. Ce petit salon servait également de poste d’équipage
lorsque le bateau n’était pas en service.
Le petit salon vu de l’extérieur.
Vu de trois quarts arrière.
La fausse cheminée installée à l’arrière du petit salon.
L’intérieur du petit salon et le bar.
Le pont supérieur
Il se situait dans la continuité du petit salon, au pont 3. Cet
espace extérieur était parfois ouvert pour que les clients puissent passer la
traversée à l’extérieur. Cependant, aucunes places assises n’étaient présentes.
Notons que sur la partie arrière du pont supérieur, on
retrouvait un petit espace fret qui permettait de transporter 3 tonnes de
marchandises lors des remplacements de l’Enez Sun III sur Audierne-Sein. Les
marchandises étaient manutentionnées à l’aide d’une petite grue.
La partie extérieure accessible aux passagers.
L’arrière du pont supérieur avec l’espace fret et sa grue.
La grue.
Visite technique
Je vous propose maintenant de découvrir les espaces réservés
à l'équipage et des aspects plus techniques de ce bateau.
Le gaillard d'avant
Nous y trouvions 4 bollards pour y tourner des aussières, et
un guindeau qui permet de manœuvrer l'ancre qui était placée sur la proue. Ce
guindeau dirigeait la chaîne depuis le puits aux chaînes vers une poulie qui la
redirigeait vers la pioche. Notons qu’un petit cabestan était installé sur le
guindeau.
Le gaillard vu de l’extérieur.
Le gaillard vu du salon.
La pioche.
Le gaillard d’arrière
Le gaillard d’arrière était situé derrière le salon
principal du bateau. Nous y trouvions 2 bollards pour y tourner des aussières
et d’un cabestan. Notons qu’une pioche était en place sur la poupe.
Le gaillard d’arrière.
La pioche.
La passerelle
Située sur l'avant du pont 3, elle regroupait tous les éléments
qui permettaient de contrôler et de manœuvrer le navire : la barre à roue, les
manettes des gaz, la VHF, le radar et tous les autres composants nécessaires à
piloter et à contrôler le navire.
Vue extérieure de la passerelle.
Vue de trois quarts arrière.
L'intérieur de la passerelle.
Le pupitre navigation avec le tableau moteur juste en-dessous, à gauche
de l’image.
Vu de l’autre côté.
Le mât radar
Sur le toit de la passerelle, on retrouvait un mât qui est
équipé de deux radars, d’une corne de brume et des feux de navigation. Sur le
toit de la passerelle, on retrouvait un projecteur.
Le mât radar dans toute sa hauteur.
L’un des deux radars.
Le projecteur de recherche.
La machine
L’André Colin était pourvu de 2 moteurs MWM type TBD 620 développant
chacun 1525 kW. Chaque moteur entraînait une hélice à pales fixes par
l’intermédiaire d’un réducteur. À bord, la production d'électricité était
assurée par deux groupes électrogènes développant au total 136 kW.
Le moteur bâbord.
Le moteur tribord.
Un arbre d’hélice sortant d’un réducteur.
Le PC machine
Le poste des commandes de la machine est situé au pont 1,
devant la salle des machines. On y retrouvait toutes les armoires de commande
qui regroupaient divers voyants ou écrans qui signalaient que tous les organes
du moteur et des groupes électrogènes fonctionnaient correctement. A proximité des
armoires de commandes, un petit établi était installé.
Le PC machine.
Le local barre
Situé dans la continuité de la salle des machines, le local
barre était l’endroit où l’on trouvait la barre hydraulique des safrans du
navire. On retrouvait juste derrière la barre un indicateur de position de
cette dernière qui était très pratique en cas de panne des commandes de la
barre à la passerelle. En cas de problème sur la transmission principale, il
était possible d’agir directement sur la barre à l’aide d’un palan.
L’axe de la barre du safran bâbord.
La sécurité à bord
Pour assurer l’abandon du navire en cas de naufrage, l’André
Colin était doté de 3 radeaux de sauvetage se gonflant automatiquement
lorsqu'ils rentraient en contact avec l'eau.
En plus de ces 3 radeaux de sauvetage, nous retrouvions
aussi 5 bouées de sauvetage, dont 2 sur le gaillard d’avant, 1 sur le gaillard
d’arrière et 2 sur le pont supérieur.
Un des trois radeaux de sauvetage du bord, fournis par l'entreprise Viking.
L'une des 5 bouées couronne du navire.
André Colin, une vedette ayant fait son temps
Assez rapide mais pas très confortable, l’André Colin était la
seule vedette à passagers appartenant au Conseil Départemental du Finistère. Malgré
sa longueur importante, sa capacité en passagers était faible et ces derniers
étant tous installés dans le salon principal. Ainsi, ils n’avaient pas beaucoup
de place et les ponts extérieurs était exigus et pas souvent ouverts. Navire
mal conçu, l’André Colin avait une carène dite « semi-planante » mais
ce dernier roulait et tanguait même par temps calme. De plus, sa construction
en acier était trop lourde pour le concept de carène semi-planante et le navire
ne déjaugeait pas assez malgré sa forte puissance : la vitesse n’était
ainsi pas très élevée. Enfin, sa puissance motorisation était très énergivore
en carburant. Tous ces raisons conjuguées à une fatigue structurelle de la
coque et des moteurs ont entraîné l’arrêt définitif de l’exploitation de
l’André Colin après la saison 2014.
En 2018 la Région Bretagne a décidé de céder l’André Colin au
chantier Navaleo de Brest afin de le déconstruire, après seulement 20 ans de
services sur les îles finistériennes.
André Colin, une vedette rapide peu rentable et ayant mal vieillie...
L'André Colin en juin 2018 aux côtés d'autres navires condamnés et attendant leur démolition à Brest.
Un grand merci à Michel
Floch, Pascal Moreau pour leurs photos ainsi que Fabrice Dufour pour son aide
précieuse et ses clichés.
Texte, bannière et
mise en page : Alspace
Photos :
Alspace, Fabrice Dufour, Michel Floch.